Page:Correspondance inédite (1870-1875) d'Arthur Rimbaud, 1929.djvu/78

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d’un an la vie ordinaire pour ce que vous savez. Enfermé sans cesse dans cette inqualifiable contrée ardennaise, ne fréquentant pas un homme, recueilli dans un travail infâme, inepte, obstiné, mystérieux, ne répondant que par le silence aux questions, aux apostrophes grossières et méchantes, me montrant digne dans ma position extra-légale, j’ai fini par provoquer d’atroces résolutions d’une mère aussi inflexible que soixante-treize administrations à casquettes de plomb.

Elle a voulu m’imposer le travail, perpétuel, à Charleville (Ardennes) ! Une place pour tel jour, disait-elle, ou la porte. Je refusai cette vie ; sans donner mes raisons : c’eût été pitoyable. Jusqu’aujourd’hui, j’ai pu tourner ces échéances. Elle, en est venue à ceci : souhaiter sans cesse mon départ inconsidéré, ma fuite ! Indigent, inexpérimenté, je finirais par entrer aux établissements de correction. Et, dès ce moment, silence sur moi !

Voilà le mouchoir de dégoût qu’on m’a enfoncé dans la bouche. C’est bien simple.

Je ne demande rien, je demande un renseignement. Je veux travailler libre : mais à Paris que j’aime. Tenez : je suis un piéton, rien de plus ; j’arrive dans la ville immense sans aucune ressource matérielle : mais vous m’avez dit : Celui qui désire