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Page:Correspondance littéraire, philosophique et critique, éd. Garnier, tome 15.djvu/374

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du plus généreux des peuples vont traiter la grande affaire du salut de l’État !… »

C’est M. de Saint-Lambert qui, en qualité de directeur de l’Académie, a été chargé de répondre au discours de M. Vicq d’Azyr. Quoiqu’il n’y ait pas dans le dernier de ces discours beaucoup plus de mouvement et d’éloquence que dans l’autre, on y a remarqué deux ou trois morceaux dont l’expression et la pensée ont paru également heureuses et frappantes.

En parlant du progrès qu’ont fait de nos jours les hautes sciences, des rapports communs qui les lient entre elles et toutes ensemble avec les arts et les talents de l’imagination, il termine le tableau par cette belle image : « L’empire de la science n’est plus un vaste désert où l’on trouvait quelques sentiers pénibles marqués par les pas des géants ; c’est un pays cultivé, semé de toutes parts de routes faciles qui conduisent de l’une à l’autre, et que les habitants peuvent parcourir sans fatigue. »

Dans l’éloge qu’il fait de la manière d’écrire de M. de Buffon, il s’exprime ainsi : « Ce sont toujours de grandes choses exposées avec simplicité : tous les détails sont grands, l’ensemble est sublime. L’envie a voulu y voir de la parure, il n’y a que de la beauté. » Il appelle le jardin du roi et le cabinet d’histoire naturelle une bibliothèque immense qui nous instruit toujours et ne peut jamais nous tromper. Aristote, ajoute-t-il, et c’est le dernier trait de la réponse académique, « Aristote, pour rassembler sous ses yeux les productions de la nature, avait eu besoin qu’Alexandre fît la conquête de l’Asie ; pour rassembler un plus grand nombre des mêmes productions, que fallait-il à M. de Buffon ? Sa gloire. »

La séance a été terminée par la lecture qu’a faite M. l’abbé Delille de deux morceaux d’un poëme sur l’Imagination. Le sujet du premier est le choix des monuments qu’il faudrait ériger à ceux dont on chérit ou dont on respecte la mémoire ; on y a trouvé de superbes tableaux mêlés à des idées infiniment touchantes ; on y a fort applaudi quelques vers vraiment admirables sur les tombeaux de ces rois fainéants qui n’ont fait que changer de sommeil, jetés par le sort du néant de la vie au néant de la mort, etc. Dans le second morceau, le poëte, en célébrant les charmes de l’espérance, fait une description très-piquante de la manière dont le fameux Mesmer savait enivrer de cette douce illusion la foule de ses malades ; il compare le banquet magné-