Aller au contenu

Page:Correspondance littéraire, philosophique et critique, éd. Garnier, tome 15.djvu/506

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dans les papiers de M. le maréchal de Richelieu une lettre originale de la duchesse de Modène, fille du régent, au maréchal qui était alors son amant. Cette lettre commence par ces mots qui sont en chiffres :

« Voici enfin la fameuse histoire. J’ai arraché le secret. Il m’a horriblement coûté… »

Vient à la suite l’histoire du Masque de fer, d’après la déclaration faite par son gouverneur au lit de la mort, telle qu’elle suit.

« Pendant la grossesse de la reine, deux pâtres se présentèrent et demandèrent à parler au roi, et lui dirent qu’ils avaient eu une révélation par laquelle ils avaient appris que la reine était grosse de deux Dauphins, dont la naissance occasionnerait une guerre civile qui bouleverserait tout le royaume. Le roi écrivit sur-le-champ au cardinal de Richelieu, qui lui répondit de ne point s’alarmer et de lui envoyer les deux hommes, qu’il s’assurerait de leurs personnes et les enverrait à Saint-Lazare.

« La reine accoucha à l’issue du dîner du roi d’un fils (Louis XIV) en présence de toutes les personnes qui, par état, sont présentes aux couches de la reine, et l’on dressa le procès-verbal d’usage.

« Quatre heures après, Mme Perronet, sage-femme de la reine, vint dire au roi, qui goûtait, que la reine sentait de nouvelles douleurs pour accoucher. Il envoya chercher le chancelier et se rendit avec lui chez la reine, qui accoucha d’un second fils plus beau et plus gaillard que le premier. La naissance fut constatée par un procès-verbal qui fut signé par le roi, le chancelier, Mme Perronet, le médecin et un seigneur de la cour, qui devint par la suite le gouverneur du Masque de fer, et fut enfermé en même temps que lui, comme on le verra incessamment.

« Le roi dressa lui-même, à trois fois différentes, avec le chancelier, la formule du serment qu’il fit prêter à tous ceux qui avaient été présents à ce second accouchement de ne révéler ce secret important que dans le cas où le Dauphin viendrait à mourir,

    est douteux maintenant qu’elle soit jamais satisfaite. Nous croyons inutile de mentionner ici les nombreux ouvrages publiés sur ce personnage mystérieux que l’on disait être le comte de Vermandois, le duc de Beaufort, le duc de Montmouth, le comte Matthioli, ministre du duc de Mantoue, un frère jumeau de Louis XIV, un enfant adultérin d’Anne d’Autriche et du duc de Buckingham, le fruit d’un mariage secret de cette princesse, devenue veuve, avec Mazarin, et enfin une victime des Jésuites. (Ch.)