Aller au contenu

Page:Correspondance littéraire, philosophique et critique, éd. Garnier, tome 15.djvu/546

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

verte de quelque rocher ; à ses côtés est une femme qui, prête à se noyer, recueille encore un reste de forces pour soulever l’enfant qu’elle tenait dans ses bras. Toutes ces figures sont d’un choix intéressant et d’un très-beau dessin, mais on remarque trop d’égalité dans le ton des chairs ; on ne voudrait pas que la lumière fût aussi également répandue partout. On pense encore que la scène aurait eu plus d’effet si le peintre l’avait placée sur un plan plus reculé. L’ensemble du tableau n’offre pas à l’œil l’idée d’un espace assez grand. Il est impossible de ne pas comparer ce tableau avec celui de la galerie du Luxembourg. Ce n’est aussi qu’un petit tableau que ce chef-d’œuvre du Poussin, mais combien l’étendue qu’il embrasse est plus vaste, combien l’effet qu’il produit est plus sombre et plus terrible ! On n’y distingue également qu’un petit nombre de figures, mais tout annonce que ce sont là les seuls restes de l’humanité entière, tout rappelle que voilà le dernier moment de la nature expirante.

La Descente de croix, du même artiste, prouve aussi beaucoup de talent ; le style tient des meilleurs maîtres de l’Italie. La figure du Christ et celle de la Vierge, de la Madeleine et de saint Jean sont très-belles. On croit cependant que la tête de la Vierge n’est pas parfaitement ensemble. Ce tableau est pour la chapelle royale de Fontainebleau.

Sabinus et Éponine découverts avec leurs enfants dans leur retraite par les soldats de Vespasien, par M. Taillasson. Le sujet est conçu avec esprit. Il y a de l’intérêt dans les têtes de Sabinus et d’Éponine, beaucoup d’expression dans celle de l’un des enfants, mais le ton général du tableau est un peu gris. La scène moins éclairée aurait eu plus d’effet. Son Herminie, sa sainte Cécile et son Abelard manquent de couleur.

Ulysse sortant de Sparte avec Pénélope pour retourner à Ithaque, ou la Pudeur, par M. Le Barbier. « Icarius ayant marié sa fille à Ulysse fit d’inutiles efforts pour engager son gendre à se fixer à Sparte. Au moment qu’il le vit partir pour Ithaque, il redoubla ses instances et se mit à suivre son char. Las de tant d’importunités, Ulysse dit à sa femme d’opter entre son père et son époux ; alors Pénélope rougissante ne répondit qu’en mettant un voile sur son visage. Voyez Pausanias. »

Ce sujet présente peu d’action, mais il exige beaucoup de grâce et une grande finesse dans l’expression. M. Le Barbier ne