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NOVEMBRE 1767.

qui a été l’instrument de ses malheurs et la victime de ses propres fautes.

M. Coster, de Nancy, a fait imprimer l’année passée un Éloge de Charles III, dit le Grand, duc de Lorraine. Il n’y a rien de recommandable dans M. Coster que ses intentions. Il se propose de faire successivement l’éloge historique des meilleurs princes de sa patrie ; mais il n’a rien de ce qu’il faudrait pour exécuter ce projet. Charles, dit le Grand, dont il s’agit ici, était le contemporain de Henri le Grand, roi de France, que nous aimons mieux nommer Henri IV, et qui n’a pas besoin d’un surnom pour être cher à toute âme sensible. La Lorraine a eu plusieurs excellents princes. C’est un bonheur assez commun aux petits États ; mais, en revanche, ils sont souvent exposes à être la victime de la querelle de deux voisins puissants qui détruisent en une campagne ce que la sagesse a été un siècle à établir et à cimenter. Tel a été longtemps le sort de la Lorraine. Un éloge bien fait de ses meilleurs souverains ne pourrait manquer de lecteurs.

M. Dagues de Clairfontaine a publié un Éloge historique du célèbre Duquesne, lieutenant général des armées navales de France. Duquesne était digne d’un meilleur historien que M. Dagues de Clairfontaine, qui a dédié sa brochure à la ville de Dieppe, qui l’en a remercié par un arrêté de ses échevins.


15 novembre 1767.

M. Marmontel rapporte quelque part, dans sa Poétique française, un trait historique arrivé de nos jours. Un vieillard, habitant du Languedoc et protestant, est condamné aux galères pour avoir fait quelques actes de sa religion ; peut-être même avait-il facilité l’évasion d’un ministre qui allait être pendu pour avoir prié Dieu avec les gens de sa croyance. Le fils de ce vieillard trouve le moyen de corrompre le conducteur de la chaîne, et obtient de lui la grâce d’être substitué au lieu et à la place de son père, âgé et infirme, qu’il délivre ainsi, en se livrant à l’infamie et à l’infortune. « Combien, s’écrie M. Marmontel, en parlant de ce fait, de traits plus courageux, plus honorables, plus touchants, que ceux que consacre l’histoire