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JUIN 1768.

Quand je dis qu’il nous est venu, cela veut dire que deux ou trois exemplaires de cet écrit ont échappé à la vigilance de la police, et circulent dans Paris de mains en mains ; mais on ne peut les avoir pour de l’argent, ou quand on les vend sous le manteau, on se fait payer le risque auquel on s’expose par cette espèce de contrebande qui est poursuivie avec la plus grande sévérité : de sorte que les amateurs payent un, deux et plusieurs louis, ce qui peut valoir vingt-quatre sous ou un écu. La Profession de foi des théistes est adressée au roi de Prusse. Outre le préambule, elle est partagée en dix petits chapitres dont voici les inscriptions : 1. Que Dieu est le père de tous les hommes ; 2. Des superstitions ; 3. Des sacrifices de sang humain ; 4. Des persécutions chrétiennes ; 5. Des mœurs ; 6. De la doctrine des théistes ; 7. Que toutes les religions doivent respecter le théisme ; 8. Bénédictions sur la tolérance ; 9. Que toute religion rend témoignage au théisme ; 10. Remontrance à toutes les religions. Il n’y a rien de nouveau dans la Profession de foi des théistes, rien qui n’ait été fabriqué et refabriqué bien souvent dans cette manufacture ; mais c’est une des maximes fondamentales établies par le chef de cette manufacture, que les hommes sont de dure conception, et que la vérité ne peut se nicher dans leur cerveau qu’à force de se présenter la même sous des formes et des tournures diverses. Il s’en faut bien que cette Profession de foi vaille les Conseils raisonnables adressés à M. Bergier. L’auteur de la Profession en a cité le plus beau morceau, et l’a inséré tout au long. Ce morceau, c’est le chapitre des Martyrs, tiré des Conseils raisonnables ; il est très-supérieur au reste de la Profession : c’est un chef-d’œuvre de l’éloquence la plus pathétique ; on ne peut le lire sans être touché aux larmes.

— Il vient d’arriver de cette manufacture intarissable un écrit de quarante-deux pages in-8° intitulé Épître aux Romains par le comte Passeran : traduite de l’italien. Ce n’est point, comme vous voyez, l’épître de saint Paul du Nouveau Testament, mais une épître qui entrera dans le nouveau canon qui se prépare, et où le comte Passeran, le comte Da….., le comte de Boulainvilliers, et plusieurs autres comtes de cette espèce, tiendront la place de l’apôtre saint Paul, qui n’était pas comte, et à qui le comte Passeran dispute en passant son titre de citoyen romain. Cette épître est adressée aux Romains modernes, à qui