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Page:Correspondance littéraire, philosophique et critique, éd. Garnier, tome 9.djvu/234

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Dieu me garde des ingrats
De grossir la fourmilière,
Et, d’ailleurs, cet hippocras
N’est rien moins que somnifère :
À rimer entre deux draps,
J’ai passé la nuit dernière ;
Mais tout ça ne vous plaît pas :
Car tout Hélas !
Car Vous n’m’aimez pas.

Et pourtant rien n’est si vrai :
Quoique aveugle comme Homère,
Je suis encore aussi gai
Que Rabelais et Molière ;
J’ai comme eux de jolis rats :
Mais sage et même un peu fière,
Tout ça ne vous plaira pas :
Car tout Hélas !
Car Vous n’m’aimez pas.

Gens d’esprit, gens délicats,
Gens aimant la bonne chère,
Seigneurs, princes, potentats,
Tout vous aime et vous révère.
Tapi dans mon galetas,
Enterré dans la poussière,
De moi peut-on faire cas ?
Car tout Hélas !
Car Vous n’m’aimez pas.

Quand j’aurais les dons à tas
De l’Académie entière,
Comme je ne les ai pas,
Ça ne m’avancerait guère :
Ma muse y perdrait ses pas ;
Vidons notre cafetière.
Du moins si vous n’m’aimez pas,
Car tout Hélas !
Car N’m’haïssez pas.

— Puisque nous avons commencé l’année par des chansons, il faut placer ici celle que le patriarche vient de faire pour une dame qui s’appelait Marie, et qui, étant à Ferney, se plaignait de ne pouvoir pas faire d’enfants[1].

  1. Cette chanson est de Boufflers, et non de Voltaire.