revenir au galimatias, quand même il aurait l’air philosophique ; il nous faut aujourd’hui des penseurs, des têtes neuves pour captiver notre suffrage, et non des retourneurs d’idées et de paroles, ou des raisonneurs à perte de vue. Ceux-ci écriront pour l’instruction ou l’amusement des esprits communs comme eux, à la bonne heure : il n’y a pas de mal qu’un plat lecteur lise un plat auteur, et croie en être devenu plus savant ; mais à condition qu’ils restent dans le calendrier, relégués parmi le commun des martyrs, car, pour être chômé exprès et nommément, il faut avant tout être au niveau de son siècle.
On a voulu renouveler, ces jours-ci, sur le théâtre de la Comédie-Française, le scandale produit il y a tout juste dix ans par la comédie des Philosophes. M. le maréchal de Richelieu a présenté aux Comédiens français une pièce en vers et en trois actes, intitulée le Satirique, ou l’Homme dangereux. Il leur a recommandé de se mettre tout de suite en état de la jouer. Les Comédiens ont voulu, suivant l’usage, la porter d’abord à la censure de la police pour avoir son approbation. M. le maréchal, en qualité de leur supérieur, s’y est opposé ; il a dit qu’il en faisait son affaire, et que, dès que la pièce serait sue, il apporterait l’approbation de la police. On devait donc jouer l’Homme dangereux ces jours derniers ; mais la police, après avoir fait examiner la pièce, n’a pas jugé à propos, malgré la protection de M. le maréchal de Richelieu, d’en permettre la représentation.
Ce refus de la police a donné de la célébrité à la pièce. On en a voulu connaître l’auteur. Les uns disaient qu’elle était de Palissot, d’autres soutenaient qu’elle en était si peu, que Palissot y était encore plus maltraité que les philosophes. On attribuait donc la pièce à Rulhière, qui la désavouait hautement. Palissot lui-même crut devoir quitter son asile d’Argenteuil, où il vit depuis longtemps, dans une honorable retraite, avec Mlle Fauconnier et quelques autres vertus de ce genre. Il écrivit à l’abbé de Voisenon qu’il venait d’apprendre qu’on était sur le point de jouer à la Comédie-Française une pièce où il était déchiré à belles dents ; qu’il espérait que l’abbé de Voisenon