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Page:Cortés - Lettres à Charles Quint, trad. Charnay, 1896.djvu/190

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line. J’ordonnai à quelques-uns de mes soldats, parmi les plus lestes, qu’ils s’efforçassent d’escalader le côté le plus âpre de la colline pendant que nous en ferions le tour avec nos chevaux. Quand les Indiens virent les Espagnols grimper jusqu’à eux, ils tournèrent le dos, pensant échapper par la fuite, mais tombèrent sur nos quinze cavaliers qui avec les Tlascaltecs en firent un terrible carnage ; en peu d’instants plus de cinq cents des leurs restèrent sur le carreau, pendant que les autres s’enfuyaient dans la montagne. Les six autres cavaliers se trouvaient sur une voie plaine et large, où ils pouvaient à loisir se servir de leurs lances ; quand, à une demi-lieue de Xuchimilco, ils tombèrent sur des bataillons indiens qui venaient au secours de la ville ; ils les défirent, et, nous trouvant tous réunis, il était dix heures, nous retournâmes à Xuchimilco. Nous trouvâmes nos hommes à l’entrée, inquiets de notre absence et désireux de savoir ce qui nous était arrivé. Ils me contèrent qu’ils avaient été serrés de fort près et qu’ils avaient eu beaucoup de peine à repousser les Mexicains dont ils avaient tué quelques centaines. Ils me donnèrent deux de nos épées qu’ils leur avaient reprises et me dirent que les arbalétriers n’avaient plus de flèches. Sur ces entrefaites, avant même que nous eussions mis pied à terre, déboucha tout à coup d’une large chaussée, une nouvelle troupe hurlante de Mexicains. Nous courûmes sur eux, et comme il y avait de l’eau de chaque côté de la chaussée, nous les jetions dans la lagune. Les ennemis défaits, je rappelai mes gens et nous retournâmes à la ville bien fatigués. Je fis tout incendier, à l’exception des bâtiments que nous occupions. Nous y étions restés trois jours sans cesser un instant de combattre, et nous partîmes, laissant la ville détruite et déserte, et c’était un spectacle étrange, car elle contenait une foule d’édifices et de temples sur leurs pyramides, et pour ne point m’éterniser, je me tais sur une foule de choses intéressantes.

Le jour que je partis, je m’arrêtai sur une place, en terre ferme près de la ville, où les habitants tiennent leur marché ; je venais de fixer l’ordre de la marche : dix chevaux à l’avant, dix autres au centre avec les gens de pied, et moi avec dix autres à l’arrière-garde, quand les Indiens de Xuchimilco, nous voyant