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Page:Cortés - Lettres à Charles Quint, trad. Charnay, 1896.djvu/192

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secourir nos alliés ; je n’avais donc pas à m’arrêter à Tacuba. Des gens de Mexico qui sont tout près de là, puisque les faubourgs de leur ville s’étendent jusqu’à Tacuba, voyant que nous poursuivions notre voyage de ce côté, assemblèrent une force considérable et se jetèrent résolument au milieu de nos porteurs de bagages ; mais nos cavaliers, venant en bon ordre dans un pays plat, les dispersèrent sans éprouver aucune perte. Comme nous chargions de droite et de gauche, deux de mes domestiques qui me suivaient généralement en campagne, s’étant écartés, furent enlevés par les ennemis qui durent les sacrifier comme de coutume. Dieu sait quelle douleur j’en ressentis, car c’étaient de braves gens, qui s’étaient toujours bien comportés au service de Votre Majesté. En sortant de Tacuba, nous poursuivîmes notre route à travers des populations riveraines, escarmouchant sans cesse. J’appris alors comment des Mexicains m’avaient enlevé ces deux hommes, et pour les venger, les ennemis me suivant toujours, entonnant des chants de victoires, avec vingt chevaux, je me mis en embuscade derrière quelques maisons, laissant mes hommes et les bagages filer à l’avant ; les Indiens les suivirent pleins de confiance ; alors je m’élançai au cri de « Santiago ! » je tombai au milieu d’eux et avant qu’ils pussent se réfugier dans la lagune, nous en massacrâmes une centaine des principaux et des plus brillamment armés, ce qui leur ôta l’envie de nous suivre. Ce jour-là, nous allâmes dormir à Coatlinchan, deux lieues plus loin ; nous y arrivâmes bien fatigués et mouillés jusqu’aux os, car il avait plu le soir. La ville était déserte. Nous poursuivîmes escarmouchant toujours avec des Indiens qui nous accompagnaient hurlant et nous allâmes camper dans un village appelé Gilotepeque, également abandonné. Le jour suivant, nous atteignîmes vers midi la ville d’Oculman qui dépend de Tezcoco où nous arrivâmes à la nuit. Nous y fûmes reçus par nos compagnons comme des sauveurs, car depuis notre départ, ils n’avaient point eu de nos nouvelles et pendant notre absence avaient eu maintes échauffourées. Les habitants leur disaient chaque jour, que les Mexicains profiteraient de mon voyage pour venir les attaquer. Ainsi se termina avec l’aide de Dieu une expédition qui fut des