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IMPRESSIONS DES ANNAMITES

« Ils ont compris qu’en Europe la cause principale de l’avancement, c’est la nécessité ; chacun, en effet, est dans l’obligation de gagner de l’argent. Votre brillante fortune intellectuelle pourrait bien moins tenir aux dispositions heureuses de votre esprit qu’au petit nombre de ressources dont vous disposez. Dans l’Annam, le sol est excessivement riche ; l’esprit, n’étant pas en butte à la nécessité du travail, demeure dans l’inaction. Nous serions évidemment plus riches au point de vue intellectuel si nous étions sur une terre moins opulente.

« Il ne s’agit pas pour les chefs de vouloir transformer l’Annam pour y parvenir ; il y a à lutter contre la force d’inertie ; non-seulement l’opinion de quelques esprits est peu de chose, comparée à celle d’un peuple entier, et risque fort de n’être pas écoutée ; mais combien de superstitions à abolir, combien de coutumes à réformer, combien de préjugés à abattre, combien d’amours-propres à blesser dans cette refonte générale !

« Et le chapitre des dépenses ! — Je le passe et j’arrive à d’autres considérations. Rien de plus tenace que nos fonctionnaires dans leurs principes. D’ailleurs ils ne verront, ils n’entendront jamais les ambassadeurs. Comment parviendront-ils à se pénétrer de leurs idées ; — mais supposez même que ces grands Thomas (sic) comprennent intérieurement les avantages de la