Page:Cotret - Les voies de l'Amour, 1931.djvu/170

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
168
les voies de l’amour

sait de l’épier depuis quelque temps. Vous pensez bien que, en découvrant la correspondance secrète, Lucille n’était pas au comble du bonheur. Croyant Béatrice absente de la maison, elle s’était installée dans une grande berceuse et le coffret sur les genoux, elle avait déjà parcouru trois ou quatre lettres quand sa jeune sœur la surprit en flagrant délit. La foudre, tombant dans la chambre, n’y aurait pas fait plus de tapage et de dégât que les deux sœurs n’en firent. L’écho s’en répercuta jusque chez moi. Le lendemain Lucille et Béatrice mettaient un terme à nos amours par des lettres remplies d’insultes et d’injures que j’avais bien méritées par ma duplicité. Les deux sœurs ne s’étaient pas plus concertées qu’avant quant à la composition de leurs lettres et cependant j’y retrouvais encore les mêmes expressions piquantes et triviales. Dans la colère, leurs caractères respectifs se ressemblaient. On y reconnaissait facilement les deux sœurs élevées dans le même milieu, à un niveau plutôt médiocre.

« Ces deux lettres brisaient mes chaînes au moment où elles me devenaient lourdes à traîner. Elles m’annonçaient la délivrance juste au moment où je la désirais le plus, car un petit cupidon du village m’avait décoché une flèche qui me frappait droit au cœur en y faisant une large plaie par où les amours anciennes s’échappaient, et par laquelle pénétrait une passion nouvelle, unique