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les voies de l’amour

tutoyer comme autrefois ! Celle que je poussai dans vos bras dans l’unique but de vous faire oublier Andrée, c’était Lucille. Celle que je feignais d’aimer pour vous encourager dans votre nouvel amour et que je détestais de tout mon cœur, c’était Béatrice. Vous devinez maintenant qui je suis sous cette apparence de vieille loque ; je suis Jean Roy, le faux ami, l’hypocrite, le serpent que vous avez réchauffé si longtemps sur votre sein. Dieu m’a déjà puni, mais pas assez pour le mal que j’ai fait. Vous voyez ce que je suis extérieurement, mais ce qui se passe dans mon for intérieur vous ne pouvez l’imaginer ; le remords me ronge le cœur et l’âme, et je souffre les tourments des damnés ! J’étais à peine reçu médecin que je me mis à boire ; je devins vagabond et je m’adonnai à l’usage de la morphine et de la cocaïne. Je tombai de précipice en précipice, et je suis devenu le vieillard, l’abruti, la brute qui te dégoûte. J’ai mérité mille fois mon sort. Ah ! punis-moi à ton tour. Frappe-moi ; écrase-moi ; tue-moi, car je suis la vipère, le serpent qui a levé la tête pour mordre et injecter le venin mortel. J’ai croisé ton chemin en rampant ; je m’y retrouve encore. Ah ! prends garde ; mes morsures sont encore dangereuses ; mes glandes salivaires ont encore du poison actif. Écrase-moi donc ; tue-moi donc pour tout le mal que je vous ai fait à Andrée et à toi. Débarrasse la terre du monstre que je suis. »