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les voies de l’amour

étions encore assis sous le gros érable en face du fleuve. La nuit était bleutée, écouteuse ; tout paraissait dormir autour de nous. Seul parfois le grillon poussait son cri strident et puis rien autre que le léger frou-frou des feuilles qui se détachaient de l’arbre et descendaient en tournoyant autour de nous. Andrée, ramassant celles qui tombaient sur ses genoux, en regardait avec mélancolie les teintes de l’or, du cuivre ou de la rouille qui donnent tant de cachet à nos beaux érables à la fin de l’été et au début de l’automne. Par instant ses yeux se détachaient des feuilles qu’elle tenait entre ses mains déjà potelées et regardaient avec un air de tristesse au loin sur le beau fleuve. Elle y voyait un léger esquif qui paraissait porter le bonheur dans ses flancs. Elle y voyait deux jeunes gens. « Oh ! qu’ils sont heureux, disait-elle ; ils sont unis avant que l’automne ne soit venu, avant que les feuilles ne soient toutes tombées. Ô ! Michel, heureux ils s’en vont au fil de l’onde tranquille qui reflète toute la beauté du ciel. Ô ! mon Michel, comme ils sont heureux… Je voudrais moi aussi comme eux avant que l’automne n’arrive… Quand donc le vrai bonheur me sourira-t-il à tout jamais… Michel, Ô ! mon Michel, comme je voudrais…

« Regards mélancoliques, soupirs profonds, phrases à demi achevées, ton mystérieux ! Je comprenais en ce moment plus que jamais le langage de l’amour, de l’amour