Page:Cottin - Œuvres complètes, Ménard, 1824, tome 1.djvu/213

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cher, si vous attachez quelque prix à mon estime, ni vos discours, ni votre maintien, ni vos regards ne décèleront votre égarement… » Il ne répondait point ; toujours immobile, il semblait que la vie l’eût abandonné : la voiture avançait toujours ; je n’avais plus qu’un moment, déjà j’entendais la voix de M. d’Albe ; alors, me rapprochant de Frédéric : « Parle donc, malheureux ! lui ai-je dit ; veux-tu me faire mourir ?… » Il a tressailli… « Claire, a-t-il répondu, tu le veux, tu l’ordonnes, tu seras obéie ; du moins pourras-tu juger de ton pouvoir sur moi. » Comme il prononçait ces mots, mes gens m’avaient reconnue, et la voiture s’est arrêtée : mon mari est descendu. « J’étais bien inquiet, m’a-t-il dit ; mes amis, vous avez tardé bien long-temps ; si la bienfaisance n’était pas votre excuse, je ne vous pardonnerais pas d’avoir oublié que je vous attendais ». Sens-tu, Élise, tout ce que ce reproche avait de déchirant dans un pareil instant ? Il m’a atterrée ; mais Frédéric… Ô amour ! quelle