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d’orient et l’armée du Danube ou d’Illyrie. Les deux premières composées chacune de huit légions s’ignoraient, non seulement parce que leurs cantonnements étaient distants mais parce qu’elles étaient différemment recrutées — la première presque entièrement composée de Celtes et de Germains des confins formant en général des légions distinctes — la seconde, renfermant une forte majorité d’asiatiques, Syriens, Égyptiens, Cappadociens, etc Quant à l’armée d’Illyrie, elle était divisée en deux groupes l’un en contact avec les troupes d’orient, l’autre avec celles d’occident. Elle pouvait ainsi servir d’appoint soit à droite soit à gauche. Il y avait encore, plus isolées, l’armée d’Espagne et celle d’Afrique. Dans tous ces corps l’attachement à l’unité romaine était grand mais l’esprit de corps ne l’était pas moins et à mesure que parvenaient de Rome des nouvelles propres à en ébranler le prestige certains nationalismes commençaient à marquer leur inquiétant éveil.

Galba proconsul en Espagne fut acclamé à Rome par les prétoriens qui bientôt lui substituèrent Othon tandis que les légions de Germanie élevaient Vitellius. Une année suffit à ces trois empereurs de hasard pour s’entretuer (68-69). L’armée d’orient lasse d’obéir aux autres choisit alors Vespasien. Il était occupé avec son fils Titus à réduire la Palestine. Il fut proclamé à Alexandrie le 1er juillet de l’an 69. Cette fois l’empire romain avait un chef.

iv

Vespasien qui n’était plus jeune et qui était d’extraction modeste n’avait accepté le pouvoir suprême qu’avec hésitation. Originaire du pays sabin, son grand-père simple sous-officier de l’armée de Pompée était devenu par la suite receveur des contributions. Son père avait été s’établir chez les Helvètes et y fonder une banque. C’est là, à Aventicum (Avenches) sur les bords du lac de Neuchâtel que Vespasien avait été élevé. Fonctionnaire civil puis militaire, il s’était distingué en Germanie et en Bretagne[1]. Chargé du proconsulat d’Afrique, il y avait laissé une part de sa fortune, témoignage d’une rare intégrité. La disgrâce avait failli tomber sur lui, cruelle et complète parce qu’au théâtre, il s’était endormi pendant que Néron chantait. Pourtant, en raison de ses capacités et de la confiance qu’il inspirait, il s’était vu confier la mission d’en finir avec les Juifs.

  1. La « Bretagne » en ce temps-là, c’était l’Angleterre. La péninsule bretonne actuelle portait le nom d’Armorique.