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l’hellénisme

Perses, ne compta pas moins d’un millier de villes et, dit Curtius, la mer Égée devint à ce point athénienne que l’apparition de la moindre flotille spartiate y était considérée presque comme une violation de frontière. Cette situation aurait-elle pu durer ? Et pourquoi non ? Mais il y eut fallu beaucoup de prudence et une certaine modestie. Périclès quoiqu’on en ait dit, manqua parfois de l’une et de l’autre. Maître de l’opinion, il eut pu la mieux diriger. La main-mise sur le trésor de la confédération et son transfert de Délos, où en était le siège social, à Athènes fut une des plus grandes fautes qu’on pût commettre. La prétention de faire juger par les tribunaux athéniens les différends entre alliés en fut une autre. Lorsque Périclès voulut provoquer la réunion d’un grand congrès panhellénique pour délibérer « sur les moyens propres à garantir à tous la sécurité de la navigation et à assurer la paix », il ne comprit pas qu’un tel congrès, pour réussir, devait se tenir en terrain neutre et non à Athènes.

Sparte, pendant ce temps, sentait grandir sa jalousie et son inquiétude mais elle était plus inquiète que jalouse. Plaçant la force au-dessus de tout, elle éprouvait un certain respect pour celle dont Athènes s’était révélée capable. Par contre, les institutions athéniennes lui faisaient l’effet d’un redoutable fléau. En voyant s’étendre les privilèges octroyés à la foule et diminuer les attributions de l’ancien aréopage au profit de l’assemblée populaire, en voyant les dernières classes sociales avoir place au théâtre, aux jeux, aux cérémonies publiques et chaque citoyen recevoir une indemnité pour l’accomplissement de ses devoirs militaires, les aristocrates spartiates frémissaient. Ils n’étaient plus qu’une poignée. En plus des « Ilotes », il y avait autour d’eux ceux qu’on appelait les « amoindris » bâtards, cadets déshérités, esclaves affranchis toute une population qui disposerait bientôt d’assez de ressources pour réclamer ses droits. Sparte se décida donc à tenter d’abattre sa rivale avant que son propre prestige militaire ne fut totalement éclipsé et que les détestables principes de la démocratie athénienne n’eussent achevé de pénétrer partout. Et telle était encore la peur qu’elle inspirait à ses voisins immédiats qu’ils firent cause commune avec elle tandis que çà et là, dans le reste de la Grèce des villes dominées par le parti oligarchique se déclaraient en sa faveur. Ainsi fut déchaînée la guerre sacrilège.

La première période (431-421) se déroula sans résultat et aboutit à une paix blanche. Mais alors Athènes fut en proie aux dissensions. Ses aristocrates, d’abord modérés et demeurés constitutionnels, se laissèrent entraîner à de coupables entreprises.