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rome

l’obligation du service militaire n’atteignait pas et dont le misérable entretien ne leur coûtait guère. Enfin, par une inexcusable anomalie, ces terres dont la propriété théorique demeurait à l’État, n’étant pas inscrites au cens, ne payaient pas d’impôts. Tel était l’ensemble des circonstances grâce auxquelles la petite propriété disparaissait rapidement et avec elle la classe des hommes libres.

Dès les premières années de la république, le problème s’était posé puisqu’en 486 le consul Spurius Cassius, voulant y porter remède, proposa de révoquer les concessions territoriales faites aux patriciens et de répartir entre les plébéiens une large part des terres de l’État. Et telle était déjà la violence des passions surexcitées par l’intérêt personnel que Cassius, en butte à la haine des riches, finit par être mis à mort après un honteux simulacre d’instruction judiciaire. Le mal s’étendit. De temps à autre, la distribution de quelques hectares ou une sorte d’amnistie consentie aux endettés ne servirent que de palliatifs provisoires et insuffisants. En l’an 376 Licinius fit enfin passer les lois appelées de son nom Liciniennes. Ces lois enrayèrent pour un siècle environ la décadence. Elles limitaient le droit d’utilisation du domaine public par les particuliers et imposaient à chaque occupant l’obligation d’y employer un certain nombre d’hommes libres. L’agriculture s’en trouva ranimée et l’accaparement des terres interrompu. Mais le profond ébranlement économique et moral qui allait résulter de la chute de Carthage ne devait pas permettre aux lois Liciniennes de rétablir de façon durable les bases sociales de la république.

ii

Le royaume d’Épire traverse l’histoire à la manière des météores qui fulgurent un instant et disparaissent. Pyrrhus et ses soldats semblent n’avoir été là que pour jouer le lever de rideau du drame prochain et fournir l’incident occasionnel qui va déclancher l’intrigue. En effet, les événements se déroulent dès lors avec une implacable logique, enchaînés les uns aux autres. Vainqueurs de Pyrrhus à Bénévent et ayant soumis Tarente, les Romains s’emparent de Rhegium (Reggio) en 271. Les voici devant la Sicile dont ne les sépare plus qu’un étroit bras de mer. Le blé de Sicile est devenu de plus en plus nécessaire à la subsistance de Rome. L’occasion d’ailleurs est favorable. Des pirates de Messine sont en lutte avec Syracuse. Or dans cette