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l’afrique

des races blanches. Cet élément nous en ignorons l’origine ; mais la presque unanimité des traditions indigènes évoque, perdues dans la nuit des âges, des migrations venues de l’est. Le fait que les noirs d’Océanie ont, dans les temps historiques, essaimé à Madagascar souligne la vraisemblance de pareils essaimages opérés antérieurement, et sans doute à diverses reprises, sur le continent même. Les nouveau-venus y auraient trouvé des hommes de petite taille à peau rougeâtre et à grosses têtes dont subsistent çà et là des descendants non métissés qu’on désigne sous le nom conventionnel de « négrilles ». Débarqués sur le littoral oriental, ils eurent devant eux une immense étendue de terre habitable — encore que située en majeure partie dans la zone torride. Des fleuves, des lacs, des montagnes, des forêts — au nord, de vastes steppes — vers le sud des hauts plateaux… c’était là une nature propre à développer des tribus de chasseurs et de pêcheurs, nomades ou sédentaires selon les conditions locales, isolées en tous cas du reste du monde par des côtes sans découpures que baignaient des océans solitaires ou par la barrière d’un Sahara déjà en voie d’absolu dessèchement. Il est à croire que les premiers arrivés occupèrent les régions comprises entre le Congo, les lacs et le Zambèze refoulant les négrilles à droite et à gauche et que, de là, peu à peu, ils se répandirent à travers toute l’Afrique méridionale. Ce domaine est encore celui de leurs descendants directs, les Bantous qui représentent le type le plus intact de la race primitive et qu’il n’y a pas lieu de différencier grandement de leurs congénères de Guinée ou du Soudan. Mais l’origine commune doit être fort ancienne. Dans son remarquable précis consacré aux populations noires de l’Afrique, M. M. Delafosse, ancien gouverneur de l’Oubanghi et professeur à l’École coloniale de Paris, admet que ces populations « étaient à peu près dans le même état et occupaient à peu près les mêmes territoires il y a six mille ans qu’aujourd’hui ». Considérant en outre qu’il existe « d’une manière presque continue, à la limite de la zone désertique actuelle, de la mer Rouge à l’océan Atlantique » des peuplades chez lesquelles le sang mêlé blanc et noir se révèle à doses variables, il est porté à voir là les traces d’un métissage antérieur à l’époque historique avec des « autochtones primitifs de race blanche méditerranéenne qui étaient, à partir du Sahara central dans les pays devenus plus tard l’Égypte et la Lybie, les contemporains des négrilles ». Il y a dans ces vues la part