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absence de préjugés. Or le cardinal n’en était point exempt. Orgueilleux de sa noblesse, il se plut à la grandir en se faisant attribuer le titre de duc. L’idée d’employer des roturiers à l’exécution de ses desseins ne lui répugnait pas mais l’idée d’appuyer son gouvernement sur une représentation nationale élue par les intéressés ne dut même pas lui venir. Dès lors il ne lui restait d’autre parti à prendre que de chercher à constituer un fonctionnarisme pourvu d’autorité et de prestige dont il se servirait pour imposer aux Français l’ordre et l’obéissance tandis qu’au dehors, par la diplomatie et au besoin par la guerre, il s’efforcerait « d’abaisser la maison d’Autriche ».

Cette maison d’Autriche, c’étaient les descendants de Charles-Quint : famille turbulente dont l’aigle héraldique avec ses deux têtes couronnées symbolisait la vanité et les appétits. Au moment où Richelieu accéda au pouvoir, on pouvait craindre que l’empereur Ferdinand II (1619-1637) ne reprit à son compte le plan de monarchie universelle élaboré par Charles-Quint. Philippe II y avait échoué mais non sans avoir « troublé par ses intrigues, corrompu par son or ou désolé par la guerre civile » nombre d’États européens. L’initiative maintenant ne pouvait plus partir d’Espagne mais l’Allemagne redevenait inquiétante. De graves revirements s’y étaient produits. Au temps du concile de Trente, ce pays avait semblé presque perdu pour le catholicisme. Rétrospectivement l’abdication de Charles-Quint prenait l’aspect d’un aveu de défaite. Il ne restait plus que deux des « villes impériales », Cologne et Aix-la-Chapelle qui fussent officiellement catholiques. Toute l’Allemagne du nord appartenait aux protestants. Au sud, des partis réformateurs puissants agissaient en Bohême et même en Bavière. Il apparut néanmoins que les destins ne se fixeraient pas ainsi. Les Jésuites préparaient de toute évidence une génération de « revanchards » et le concile de Trente leur apportait un corps de doctrines homogène et précis très propre à faciliter leur tâche. Dans le camp adverse il y avait lutte ardente des calvinistes étroits et sectaires contre les luthériens plus maniables. On était loin alors d’y avoir pris son parti de ces divergences jugées affaiblis-