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la france coloniale.

mais s’il s’agit d’une maison française, rien de semblable. Je suis obligé de dessiner la pièce, de bien donner la dimension, et souvent on aura besoin de nouvelles explications qui font perdre des mois, et à la fin la pièce arrive peut-être incomplète ou mal adaptable. J’aurais eu cent fois l’occasion de faire d’importantes commandes en France, soit pour les chemins de fer, soit pour l’industrie ; j’ai échoué : quand je télégraphiais, on mettait un mois à me répondre, parce que tel inspecteur ou tel autre était en voyage, et en attendant l’occasion d’une affaire était manquée. Quand je demandais les prix ou les devis, on me répondait qu’on ne pouvait les donner de suite, et on les envoyait six mois après. Par contre, lorsque je vais chez l’Américain du Nord ou chez l’Anglais, il me montre les modèles, et je choisis. Si j’en veux un autre, il me le fait sans retard : il me donne le devis. Les hommes intelligents et sérieux ne manquent pas en France : il est certain que s’ils connaissaient ce qui se passe par le monde, ils organiseraient mieux leurs affaires, s’affranchiraient un peu du fonctionnarisme et de la routine et se mettraient en mesure de lutter avantageusement sur les divers points du globe avec l’industrie de leurs voisins. Jusqu’à ce jour, le Français reste chez lui et réduit le monde à l’Europe. »

Tout ce passage était à citer ; il constitue une critique, malheureusement trop fondée, de l’industrie française, qui conserve sans doute sur les marchés d’Europe sa grande situation, mais ne fait pas suffisamment d’efforts pour s’assurer les débouchés nouveaux que les pays étrangers et la France coloniale ont mis à sa portée. L’industrie et le commerce français sont restés timides, lents à se mouvoir,