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la république et l’église.

trouva en eux de chaleureux partisans ; ils se compromirent ouvertement dans la bataille électorale, et l’échec les laissa face à face avec les rancunes républicaines, résumées dans le mot célèbre de Gambetta : « Le cléricalisme, voilà l’ennemi ! » Or le cléricalisme, ce n’était point le christianisme. On l’a défini excellemment : « La politique affublée du masque de la religion[1]. » Même après le 16 mai, il eût été possible au clergé, sinon de regagner les bonnes grâces du gouvernement, du moins de s’assurer sa neutralité bienveillante, en séparant nettement sa cause de celle de la monarchie. Mais agir ainsi, c’était porter un coup fatal à toutes les œuvres pieuses que l’argent royaliste avait soutenues, presque seul, jusqu’alors[2]. Dans les rangs du bas clergé, beaucoup souhaitèrent néanmoins l’adhésion à la République ; l’influence épiscopale les en détourna[3]. Les prêtres séculiers français sont, d’une manière générale, infiniment respectables ; leurs mœurs sont pures, mais leur développement intellectuel est insuffisant ; ils subissent, dans leurs séminaires, la tyrannie d’une éducation basée sur des idées d’un autre âge qui ne fortifie pas le corps, ne forme pas le caractère et emplit l’esprit de formules vagues. Or, tandis que chez le curé

  1. E. Spuller, L’Évolution sociale et politique de l’Église. 1 volume, Alcan, 1893.
  2. On le vit bien plus tard lorsque le cardinal Lavigerie donna le signal du ralliement à la République. Les contributions des fidèles à l’aide desquelles l’illustre prélat soutenait ses œuvres africaines diminuèrent sensiblement : il en fut de même du denier de Saint-Pierre, en ce qui concerne la France, lorsque Léon xiii eut précisé son attitude à l’égard de la République.
  3. Ce fut le curé d’un petit bourg de Normandie qui prononça le premier, en public, les paroles d’adhésion à la République que le cardinal Lavigerie prononça à son tour, en 1891, et qui eurent un si grand retentissement.