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la question sociale.

nomme les « partageux » et amener à composition, d’autre part, les irréconciliables du parti, qui proclamaient encore, au récent congrès de Dijon (1894), l’inaliénabilité de la terre. Ils se flattent d’obtenir ce double résultat sans trop attendre. On a coutume de dire que le petit propriétaire voit dans la grande propriété qui l’avoisine la sauvegarde de son droit, et qu’ainsi il est amené à la défendre contre toute atteinte. Il est douteux que ce sentiment existe au delà de l’extension possible entrevue par le petit propriétaire ; celui-ci caresse volontiers le projet d’augmenter son bien ; il ne demande pas qu’on protège le vaste domaine qu’il ne possédera jamais[1]. Son puissant voisin, d’ailleurs, l’opprime souvent en l’enserrant et en l’annihilant ; leurs intérêts ne sont point identiques ; ils sont unis, mais on peut les séparer. Quant aux intransigeants du communisme, ils désarmeront du jour où on leur aura prouvé par des faits, que l’absolu qu’ils proclament est précisément l’obstacle à la réalisation de leurs desseins : tel est le raisonnement des « socialistes de gouvernement ».

Ils ne s’inquiètent pas non plus des divisions et subdivisions en groupes et en sous-groupes qui affaiblissent le socialisme et contribuent à inspirer confiance à ses adversaires. Un coup d’œil donné à l’état des choses dans le camp socialiste français fera mieux comprendre la sécurité des uns et des autres.

Les congrès ouvriers qui se tinrent, à Paris en 1876 et à Lyon en 1878, étaient composés presque exclusivement

  1. C’est ce qu’exprimait spirituellement un député dont les revenus personnels se montaient à 40,000 francs environ, en demandant qu’un impôt spécial fût établi sur les fortunes dépassant 2 millions.