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de la république.

pour y sceller la réconciliation des deux branches de la Maison de France et y saluer, en son cousin, le seul représentant du principe monarchique. Le prince fit cette démarche avec à-propos, tact et simplicité, et, à l’émotion qu’elle produisit en France, on put se rendre compte que, du jour au lendmnain, les chances de restauration avaient doublé[1]. Les républicains en conçurent quelque inquiétude : certains songèrent à M. Thiers, dont ils avaient méconnu les services ; d’autres, plus radicaux, se rapprochèrent du prince Napoléon, dont l’anticléricalisme les charmait.

Mais on ne tarda pas à se rendre compte qu’en réalité, derrière cette infime question du drapeau, qui surgit à l’improviste et que les chefs du parti monarchiste s’ingénièrent à éluder plutôt qu’à régler, se cachaient des divergences profondes et des antagonismes irréconciliables. M. Chesnelong ne rapporta de ses longs entretiens avec le comte de Chambord ni une solution, ni même une espérance de solution. Rien n’était accepté ni refusé : l’équivoque demeurait entière. On savait simplement que le prince était assez attaché à son drapeau et avait assez manifesté son sentiment pour que l’acceptation du drapeau tricolore eût, de sa part, toutes les apparences d’une concession faite à la Révolution. Jugerait-il à son tour que « Paris vaut bien une messe » ? Toute la question était là ; et, pour qui connaissait la rigidité de ses principes, il était peu vrai-

  1. Tandis que M. Lucien Brun, suivi bientôt du MM. de Sugny et Merveilleux du Vignaux, se rendait à Frohsdorff, les légitimistes s’occupaient de faire préparer les « voitures du Roi ». Ces voitures, qui restèrent longtemps sans destinée dans un atelier de carroserie, furent enfin achetées par la cour de Grèce et servirent lors du mariage du duc de Sparte avec la princesse Sophie, sœur de Guillaume ii.