Page:Coubertin - Lecons de gymnastique utilitaire, 1916.djvu/12

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 10 —

suite, rien n’empêcherait de le faire grimper en saisissant les barreaux de deux en deux, puis de trois en trois. La chose a de l’importance parce que l’épaule et les muscles mis en jeu donnent ici un effort déjà énergique en lui-même et que le débutant rend plus énergique encore par son inexpérience et le désarroi que l’état de suspension répand par tout le corps tant que l’accoutumance n’est pas faite.

On a médit de la barre fixe en la chargeant de tous les crimes antihygiéniques ; après quoi on l’a remplacée, au nom de la science suédoise, par une autre barre qui lui ressemble comme une sœur… La barre fixe sert à des exercices acrobatiques charmants à voir mais qui sont l’apanage de sujets exceptionnellement doués et ne doivent pas être enseignés aux jeunes gens indistinctement, surtout à des adolescents en formation. En dehors de ces exercices, il y a le simple renversement que tout garçon doit être capable d’accomplir. Je signale en passant une barre très longue, à hauteur variable et dont les grosseurs varient aussi de façon qu’à un endroit c’est presque une planche et, un peu plus loin, une grosse branche d’arbre. Cet appareil si ingénieux a été établi par les soins de M. Bertrand pour ce gymnase de Marseille où ce passionné de la culture sportive a, depuis de longues années, formé tant d’excellents élèves. Un appareil de ce genre rendrait les plus grands services dans les écoles, et il n’est pas bien difficile à confectionner.

Nous voici maintenant au rétablissement, bête noire des théoriciens dont les clameurs sont parvenues à le faire écarter des programmes. Mais on sent si bien la nécessité de cet exercice qu’il se pratique quand même en attendant qu’on lui restitue le droit de cité. Je voudrais indiquer seulement que le rétablissement au mur, de beaucoup le plus utile, est aussi de beaucoup le plus anodin car, si lisse que l’on suppose la surface du mur, les pieds, en s’y appuyant, apportent au corps une aide certaine qu’il ne trouve pas dans la planche à rétablissement sous laquelle il y a le vide. Je crois qu’on devrait toujours commencer les élèves par le mur.

La caractéristique psychologique de l’escalade est l’inverse de celle du saut. Ici, la difficulté n’est pas au départ, elle est en route. Ce n’est plus le jugement et la décision du début qui importent, mais la persévérance et le sang-froid prolongés.