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sions, le poids, etc… Ils vous invitent à vous efforcer de ressembler à cet individu conventionnel. Leurs discours n’ont pas toujours une action profonde. C’est que l’idéal anthropométrique manque de prestige sur l’imagination. L’idéal utilitaire a une tout autre puissance. L’homme vraiment « normal » puise ce caractère dans ses capacités plutôt que dans ses formes ; et rien n’établit que la capacité dépende de la forme. Des proportions parfaitement justes réjouissent l’esthétique mais ne promettent pas un débrouillard. Ce ne sont donc pas des mesures données auxquelles il faille chercher à atteindre mais des facultés qu’on doit chercher à conserver, les ayant acquises : telles les facultés de courir, celles de sauter, de grimper, de ramer, de galoper… Les « records moyens » établis par exemple pour les âges de trente, quarante, cinquante, soixante ans, seront comme des poteaux indicateurs jalonnant la route de la valeur corporelle à travers la vie.

Sur le petit cahier, il y aura une troisième colonne. Là, vous inscrirez vos médiocres performances et les progrès relatifs que votre persévérance vous aura permis d’accomplir car on progresse musculairement à tout âge ou du moins très avant dans l’âge mûr, malgré que l’opinion inverse soit faussement répandue.

Ainsi, les trois records : le mondial, le moyen, le personnel, voisineront sur votre carnet. Ce seront les éléments de votre examen de conscience physique.

On demandait « comment se servir du record » ; voilà le meilleur moyen.



N’OUBLIEZ PAS !

Et voici l’ultime précepte de la gymnastique utilitaire : n’oubliez pas ; ne laissez pas se rouiller en vous ce que la pratique, même embryonnaire, de tous ces exercices y a déposé…

La mémoire des muscles est une personne de bonne volonté. Elle se prête à de longs silences et accueillera vos appels, s’ils ne sont pas trop distancés, avec une indulgente bienveillance. Sans doute, plus vous avancerez en âge, plus ces appels devront être fréquents mais il s’agit d’une fréquence bien relative. Quoi ! en six mois, ne trouverez-vous pas le moyen de monter deux fois à cheval, de ramer quelques kilomètres, de faire deux ou trois assauts d’armes et de prendre