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mémoires olympiques

dans leurs bras pour le porter jusqu’au roi debout devant son trône de marbre, il sembla que toute l’antiquité hellénique entrait avec lui. Des acclamations inouïes montèrent. Ce fut un des spectacles les plus extraordinaires dont je me souvienne. J’en conservai l’empreinte en ce que dès lors, je fus persuadé que les forces psychiques jouaient en sport un rôle bien plus effectif qu’on ne leur attribue ; d’autres expériences ont confirmé cette conviction en moi depuis 1896, mais la science médicale aidant, une telle vérité demeure obscurcie et l’on n’en déduit pas encore les conséquences pratiques.

Ce n’est pas qu’il faille pour cela négliger les données scientifiques de l’entraînement et à Athènes même la preuve en fut fournie par un second épisode. L’Université américaine de Princeton, où enseignait mon ami W. Sloane, avait envoyé cinq athlètes de choix. L’un d’eux, Robert Garrett, qui n’avait jamais lancé le disque, s’éprit de cet exercice et y réussit tellement bien du premier coup qu’il me communiqua son désir de s’inscrire pour l’épreuve olympique. Il craignait que ce ne fût jugé « prétentieux et ridicule ». Je l’encourageai. Il s’y comporta au point de remporter un prix ! Il le dut à la perfection de sa préparation corporelle générale. Peu d’années auparavant, j’avais vu un jeune Canadien, non cavalier, prendre ainsi rang en tête des gagnants d’un concours de voltige. Ainsi à côté de la valeur du psychisme s’affirmait celle de l’entraînement méthodique général : données fécondes propres à éclairer la route future.

Cependant, à travers les provinces et les îles grecques, les petits garçons au sortir de l’école s’amusaient à « jouer aux jeux olympiques ». Après avoir pour rire couru, sauté, lancé quelques