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mémoires olympiques

pelé » à servir la cause olympique de tout son pouvoir. En effet, il devait lui rester fidèle jusqu’au bout de sa vie. Et l’amitié qui nous lia fut profonde et stable.

Le congrès du Havre dut se passer du concours de la Grèce. En Grèce, on se battait pour l’émancipation crétoise et le légitime redressement des frontières, mais le destin se montrait hostile. Amis et ennemis occupés au service de la patrie ne tournaient pas les yeux vers la Normandie. Aussi, l’Hellénisme qui avait pénétré l’atmosphère du Congrès initial de 1894 s’effaçait ici devant l’influence britannique, plus proche. C’est Arnold, sur qui l’on s’appuyait plus ou moins consciemment. À vrai dire depuis dix ans, que je cherchais à implanter en France ses doctrines, je trouvais au principe qui les portait une clarté et une force si grandes que je m’étonnais de sentir le monde moderne lent à comprendre. Cette fois encore, il ne parut pas y avoir grand progrès sur ce point, malgré le triple appui du Père Didon, de Laffan et de Bonvalot. Dans le sein même du Comité, tous n’étaient pas satisfaits. Balck trouvait qu’on perdait son temps et que les sujets traités étaient « sans rapport avec nos travaux ». Un instant, il voulut même démissionner. Ce fut la seule et passagère défaillance de sa fidélité. D’autres pensaient avec lui qu’à se mêler de tout, nous risquions d’éparpiller nos forces. Je croyais exactement le contraire et qu’à faire ainsi le caméléon, le C.I.O. se rendrait plus agissant et plus insaisissable, moins vulnérable par là aux blessures. Or, une bataille était proche que je sentais plus redoutable que la précédente, de manœuvre plus imprécise et d’issue plus incertaine encore.