Page:Coubertin - Pages d’histoire contemporaine.djvu/119

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

LA REVANCHE DE TAMMANY


12 novembre 1903.

Tout le monde, en Europe, comprend et excuse ce qui vient de se passer à Panama ; c’est logique et normal. Si, en pareil cas, l’insurrection n’est pas « le plus sacré des devoirs », elle est, à coup sûr, la plus légitime des sauvegardes. C’est pour l’isthme une question tellement vitale, cet achèvement du canal interocéanique, que tous les moyens sont bons pour l’assurer et avoir raison des « nicaraguistes ».

Par contre, ce qui vient de se passer à New-York a plongé le vieux monde dans une stupeur certaine. Nous n’avions jamais compris, de ce côté-ci de l’Océan, comment Tammany Hall avait pu s’emparer de l’administration new-yorkaise et maintenir si longtemps la grande métropole américaine sous le joug d’une savante et infernale corruption. Eh quoi ! ces Yankees d’allures si énergiques, d’esprit si ferme, de civisme si solide, ces Yankees inventeurs de la loi de Lynch et des « Comités de vigilance », c’est-à-dire de la justice sous une forme tellement expéditive qu’elle en devient parfois l’injustice, tolèrent d’être administrés par une bande de filous et n’arrivent point à se débarrasser d’une pareille tyrannie ? Mais c’est incroyable.

Aussi les américanophiles qui chez nous deviennent de jour en jour plus nombreux avaient-ils poussé un soupir de profond soulagement en apprenant naguère la retentissante victoire des honnêtes gens conduits à la bataille par