Page:Coubertin - Pages d’histoire contemporaine.djvu/164

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
148
regrets et espérances

Je n’hésite pas à le croire. Précisément parce que de telles questions présentaient pour l’Angleterre un caractère essentiel, on n’en pouvait parler qu’à condition d’admettre, dès l’abord, le principe libérateur hors duquel il n’y avait eu place jusqu’ici que pour des modus vivendi sans valeur et sans durée. Du moment que de justes indemnités étaient accordées à nos pêcheurs terre-neuviens lésés par l’abandon des avantages dont ils bénéficiaient, que la prépondérance scientifique acquise par nos savants sur les bords du Nil se trouvait garantie, qu’enfin des sécurités nouvelles venaient appuyer les énormes capitaux engagés par nous dans les entreprises égyptiennes, il nous devenait possible d’adhérer audit principe. Restait à fixer les compensations.

Malgré qu’aucun homme sincère ne puisse comparer en droit ni en fait la situation de l’Angleterre au Maroc avec celle de la France en Égypte, le parallélisme de circonstance établi entre les deux contrées et les deux situations est de nature à satisfaire sinon les esprits grincheux qui aiment à ergoter sur une virgule et présupposent toujours la mauvaise foi, du moins la portion la plus raisonnable et la plus nombreuse de l’opinion publique. Il convient en effet de prendre en considération d’abord l’ampleur de l’effort déjà accompli par les Anglais au pays des Pharaons, et aussi l’allure très franche des déclarations par lesquelles ils s’effacent devant nous dans l’empire d’Abdul-Aziz.

Mais en ce qui concerne Terre-Neuve, les éléments d’un semblable parallélisme ne paraissent pas même avoir été recherchés ; en tout cas, ils n’ont pas été trouvés. De tout temps l’Angleterre était préparée à accorder à la France, en échange de sa renonciation à l’article 13 du traité d’Utrecht, une compensation territoriale considérable. On ne saurait donner ce nom à l’abandon qui nous est fait des îlots de Los et du district du Yarbartenda, non plus qu’aux insignifiantes rectifications que va subir notre frontière entre le Niger et le lac Tchad. On le peut d’autant moins qu’il est pour ainsi dire de règle entre nations civi-