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LA TRIPLE BATAILLE DE BOHÊME


15 novembre 1904.

Connaissez-vous Prague ? Peut-être y êtes-vous venu passer quelques heures en épilogue d’une cure à Marienbad ou en complément d’un pèlerinage artistique à Bayreuth : le temps de parcourir d’une course rapide les rues pittoresques et de dénombrer, avec l’aide de Bædeker, les monuments prestigieux ; le temps de monter au Hradschin, ce palais des rois morts dont les murailles moroses enfermèrent la triste jeunesse du duc de Bordeaux — et de descendre dans la synagogue à demi souterraine où il semble que le crépuscule des âges se soit entassé et que réside l’entêtement héréditaire du peuple d’Israël ; le temps de voir les douze apôtres saluer mécaniquement, quand l’heure passe, à la petite fenêtre de l’hôtel de ville et l’admirer la gigantesque loggia où, les soirs d’été, dînait Wallenstein ; le temps de pèleriner au pont tragique sous les arches duquel flotta le corps de saint Jean Népomucène et à la chapelle où l’Enfant Jésus miraculeux, en costume de bambino millionnaire, reçoit l’hommage des descendants des hussites. Que n’êtes-vous resté davantage pour demander à cette ville étrange les leçons de son passé, l’un des plus remplis qui soient au monde, — et pour surprendre le secret de son avenir, de cet avenir dont l’Europe tremble d’avoir à s’occuper ! Sous le dôme du Musée national, de l’Acropole où, l’an dernier, la nation monta une garde d’honneur autour des cendres de Palacky, vous