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les conditions du progrès scandinave

complir chez nous est à la fois si vaine et si dangereuse. Que nos aimables visiteurs ne manquent point d’y réfléchir au cours de leur rapide voyage. Qu’ils s’empressent d’observer le profitable spectacle offert à leur curiosité. Ils verront des hommes politiques occupés à distinguer les principes vitaux de l’activité française, pour exagérer à leur gré les uns et supprimer les autres. Ils les verront traitant les exploits d’antan comme un conte de fées fait pour la marmaille et l’amputation d’hier comme une écorchure qu’un peu de sparadrap cicatrise, persécutant les opinions individuelles sous le prétexte de créer de la conviction collective, considérant qu’un terrain limitrophe est destiné à des échanges d’amourettes et que la poudre est faite pour saluer joyeusement des aubes fraternelles. Alors ils apercevront plus nettement l’excellence de l’unique recette qui leur convienne à eux aussi bien qu’à nous : l’équilibre. Équilibre entre le passé et l’avenir, entre la guerre et la paix, entre le calcul et l’idée, entre l’arme et la récolte, entre l’énergie et la pitié, entre le respect de la vie et le mépris de la mort, entre la foi aveugle et la raison émancipée, entre la justice désirable et l’inégalité obligatoire.

Équilibre difficile et méritoire, mais fécond ; équilibre qui est, après tout, le lot des peuples les plus riches et les plus intelligents.