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LE PRESTIGE FRANÇAIS


24 octobre 1902.

Dans le monde d’aujourd’hui, nous n’avons pas le genre de prestige que nous voudrions avoir, et nous ne savons pas jouir de celui que nous avons.

Jadis, on se méfiait de la France, mais elle dirigeait. À présent, elle inspire confiance, mais on ne la suit plus. C’est ce dont un grand nombre de Français ne parviennent pas à se consoler.

La troisième République est, en effet, le premier de tous les régimes successivement adoptés par notre chère et volage patrie qui ait réussi à durer ; c’est aussi le premier qui n’ait point servi de modèle en Europe et n’y ait point trouvé d’imitateurs.

La Révolution a ressemblé au feu de l’âtre ; beaucoup s’y sont chauffés ; celui qui l’allumait s’est brûlé les doigts. Que l’Europe ait profité de cette révolution, combattue passionnément par ses princes, c’est ce qu’Albert Sorel a établi dans ses beaux ouvrages et ce dont personne ne doute plus désormais. D’autres historiens ont entrepris déjà de suivre à la piste l’action napoléonienne à travers le monde. La renommée fulgurante du grand homme est à la base de plus d’un impérialisme éclos de nos jours et quiconque connaît la prodigieuse popularité dont sa mémoire jouissait aux États-Unis vers le milieu du siècle y devine l’origine des rêves de grandeur qui ont bercé depuis lors tant d’âmes américaines. Après le césarisme militaire,