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l’entente cordiale

indépendante et neutre ; on fut bien près de lui accorder en plus l’évacuation d’Alger, — elle ne l’exigea point, se contentant de voir le roi des Français refuser le trône belge pour son fils. Ainsi naquit l’entente ; cordiale avec lord Aberdeen, acariâtre avec lord Palmerston, elle n’en domina pas moins la majeure partie du règne. Ni Thiers en soutenant Méhémet-Ali ni Guizot en préparant les mariages espagnols ne se trouvèrent bien de s’en être écartés ; si, par la pensée, on retire à la monarchie de Juillet l’appui de l’Angleterre, on ne voit pas, en vérité, comment elle eût réussi à s’établir et à durer dix-huit ans.

L’entente se reconstitua sous le second Empire. La guerre de Crimée, cette lutte incohérente dans ses causes comme dans ses conséquences, puis l’expédition de Chine et surtout les traités de commerce en furent les manifestations significatives. Après 1870, une vague d’anglophobie déferla. La France ne pardonnait point qu’on l’eût laissé écraser sans venir à son aide — Et de nouveau, au lendemain d’événements qui semblaient devoir porter cette anglophobie au paroxysme, au lendemain du cliquetis de Fachoda, des menaces maladroites de M. Chamberlain et des spectacles irritants du Transvaal, nous voici ramenés par d’habiles initiatives et par un rayonnement de notre vieux bon sens en face de cette entente qui s’impose, après tout, puisque nous avons des colonies et que l’Angleterre domine les mers.

Faut-il, cette fois, tenter de donner une sanction générale, une sanction définitive au rapprochement ? Et alors, sous quelle forme le préciser ? — Trois solutions se présentent qu’on ne peut analyser ainsi au pied levé et que nous nous contenterons d’indiquer. La première consisterait à profiter des bonnes dispositions présentes pour régler d’un seul coup toutes les questions litigieuses ; mais il suffit, croyons-nous, d’en faire le relevé pour apercevoir les difficultés d’une pareille entreprise : Siam, le Maroc, Terre-Neuve, les Nouvelles-Hébrides, pour ne citer que les principaux points du globe sur lesquels porteraient les négo-