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le redressement de l’axe

explicables et que ses excès furent provoqués par des méfaits antérieurs. Quant aux reconstructions qu’elle réalisa, ils les regardent comme assez insignifiantes. Certains décrets de la Convention qui créèrent des établissements encore vivants et dont nous sommes fiers à juste titre ne leur paraissent pas suffisants à soutenir le bon renom d’une assemblée chargée par ailleurs de tant de crimes. La beauté des gestes de Marat, de Robespierre ou de Fouquier-Tinville leur échappe ; ils tiennent ces personnages pour d’ordinaires assassins ; mais surtout ils pensent que si Bonaparte consacra l’œuvre administrative de la Révolution, il en supprima totalement l’œuvre politique ; c’est là, il faut l’avouer, un point de vue difficilement contestable. Pourtant nous ne l’admettons pas et, par une de ces antithèses sentimentales qui charment nos esprits, nous avons fait de l’Empire la continuation de la République et de l’empereur le champion des idées libérales. D’ailleurs, en vrais héritiers des Romains, nous donnons le pas à l’administration sur la politique, de sorte que ces mêmes réformes, considérées par les étrangers comme accessoires, nous semblent avoir constitué la clef de voûte de l’ordre nouveau ; or cette clef de voûte tient encore !…

C’est ainsi que nous en sommes arrivés à estimer que la Révolution a réussi, alors qu’autour de nous on juge généralement qu’elle a échoué. La divergence est absolue. Elle s’étend plus loin encore. Non seulement nous sommes reconnaissants « aux grands ancêtres » de tout ce qui a pu s’accomplir de bon chez nous depuis cent ans mais, peu à peu, nous avons pris l’habitude de leur faire honneur de ce qui s’accomplit autre part. Leurs actes sont la source de toute lumière. La conscience humaine ? ils l’ont émancipée. Le gouvernement parlementaire ? on le leur doit. Les franchises municipales ? ils les ont inventées. Le droit des peuples ? ils l’ont proclamé et opposé au droit divin. — Que furent donc la Réforme et l’insurrection américaine ? des préambules sans importance. Eisenach et Philadelphie n’ont allumé que de pauvres feux dans la nuit ; à Paris, ce