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LE
PROBLÈME DE L’EUROPE CENTRALE


8 janvier 1903.

Le plus grand nombre parmi nous demeurent indifférents devant l’ombre portée de son inquiétant profil ; plusieurs l’ont signalé. Quelques-uns, trop rares, l’ont étudié avec une patriotique angoisse et cette étude, du reste, a paru calmer leur émoi.

Je ne crois pas que ceux-là se soient placés au vrai point de vue. Ils nous disent : « L’Europe ne peut pas vivre en sécurité sans l’Autriche ; si l’Autriche n’existait pas, il faudrait l’inventer, et la rétablir si elle était détruite ; donc l’Europe se trouvera d’accord pour la maintenir. » — Ils nous disent encore : « L’empereur Guillaume redoute grandement l’annexion à son empire des provinces autrichiennes de langue allemande ; donc, le cas échéant, il s’y opposera. » — Ils exaltent enfin les mérites du principe fédéraliste et le caractère pacifiant de ses applications futures ; c’est là que le gouvernement autrichien trouvera le salut. Eh bien, soit ! sans disputer admettons la valeur du fédéralisme, les craintes de Guillaume II et même l’entente européenne… Que MM. Anatole Leroy-Beaulieu et Charles Benoist me permettent de le leur faire observer, là n’est pas la question.

Voici un grand empire — celui des Habsbourg — où, depuis des siècles, les Allemands dominaient ; ils y étaient, hier, les maîtres incontestables ; ils ne sont plus aujourd’hui qu’une minorité discutée. Leur influence décroît ; leur action est énergiquement battue en brèche. Contre eux se dresse