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nous avions été bien inspirés en agissant de la sorte et en donnant à nos adversaires, comme osa le dire le président de la réunion, « non pas seulement une leçon d’excellent sport mais aussi une leçon de parfaite courtoisie ». Mieux qu’une victoire, cette affaire affermissait nos positions. Il pouvait y avoir désormais entente absolue et féconde entre le rowing français et le rowing anglais. Or il n’en fut rien ; le succès fut sans lendemain ; après avoir tant travaillé pour atteindre ce sommet, on en descendit plus vite qu’on n’y était monté. Les équipiers de la Basse-Seine revinrent d’Henley mécontents et hostiles, non point à cause de leur défaite mais parce que le ton général des choses leur avait déplu. Il se disaient horripilés par le cant britannique et certains, le dernier soir, s’étaient laissés aller par contraste à affecter un regrettable j’menfichisme. Leur aimable et dévoué président, M. Dubonnet, s’ingéniait en vain à les convertir à ses propres idées. De retour à Paris, leurs plaintes trouvèrent écho parmi la nombreuse minorité qui avait voté contre la révolution amateuriste. Il fut visible que la Basse-Seine ne tarderait pas à reprendre sa place à l’Union des Sociétés d’aviron. Une sorte de découragement s’en suivit dans le clan des « purs », comme on les appelait. Je conterai tout à l’heure un dernier effort que je tentai, l’année suivante, en faveur du rowing et qui n’aboutit pas.

Moins brillants mais plus féconds, toutes proportions gardées, avaient été les résultats obtenus au cours de 1893, par les cyclistes. Ad. de Pallissaux qui ne doutait de rien avait proposé, dès le mois de mai 1893, à l’Association Vélocipédique d’Amateurs, de se faire reconnaître par la National Cyclist’s Union et tout aussitôt, le président de l’A. V. A., M. L.-P. Reichel, s’était mis en campagne. Seulement il avait, en bon unioniste, été plus loin et demandé la reconnaissance de toutes les sociétés vélocipédiques faisant partie de l’Union des Sports athlétiques. La National Cyclist’s Union s’y était prêtée et le 5 août 1892 s’était engagée à « admettre tous les cyclistes envoyés par l’Union des Sports athlétiques aux courses organisées en Angleterre sous ses règlements ». Puis était venue l’affaire de la pétition aux Chambres, à propos de la taxe projetée sur les vélocipèdes. On n’était pas très doux en ce temps-là pour notre roulante corporation. Nous avions été assez longtemps hors la loi. J’ai encore ma « carte de circulation en vélocipède dans Paris » délivrée par la préfecture de police (2e division, 3e bureau) ; cela avait paru un premier pas utile dans la voie légale quand ces espèces de permis avaient été institués. Du moment qu’on pré-