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présider au premier établissement de ces jeux réglementés sur une base nouvelle et extrêmement compliquée.

La grande fête internationale, annoncée par la France pour l’année 1900, offrirait sans contredit les plus grands avantages si l’on se décidait à y rattacher la première célébration des Jeux Olympiques Internationaux. À Paris, avec les immenses ressources dont dispose cette capitale, à proximité des grands centres de la civilisation, au milieu même de la tradition, aidé du concours de sociétés puissamment organisées, on peut être sûr du succès. Ne serait-il pas prudent de remettre à cette date l’ouverture des luttes pacifiques modernes ? Les nouvelles Olympiades ne pourraient que gagner en éclat tout en prenant un meilleur point de départ : le commencement du siècle.

Je viens de vous donner, Monsieur le baron, une idée sommaire des opinions qui ont prévalu au sein de notre Comité. Il vous sera aisé de comprendre combien fort est notre regret de devoir décliner un honneur gracieusement offert à notre pays et perdre en même temps l’occasion d’associer nos efforts à ceux des hommes d’élite qui président à l’œuvre du rétablissement d’une belle institution antique. Conscients de la faiblesse des moyens dont dispose actuellement le peuple grec, pénétrés de la conviction que la tâche dépasse nos forces, nous n’avons pas eu la liberté du choix.

Veuillez agréer, Monsieur le baron, l’assurance de ma haute considération et de mon dévouement le plus entier.

Étienne Dragoumis. »

Sentant venir cette lettre, j’avais résolu de la devancer. J’eus à peine le temps de conférer avec M. Bikelas à son arrivée. Il ne désespérait pas du reste. Sa vaillante nature répugnait au découragement même dans les circonstances douloureuses qu’il traversait alors. Il puisait dans un patriotisme admirable la force de résister à toutes les épreuves que la vie ne lui avait pas ménagées et qui atteignaient cruellement son âme très sensible et très fine. À l’heure donc où la lettre de M. Dragoumis arrivait à Paris, j’arrivais moi-même à Athènes. J’avais au reste pris mes précautions pour le cas, improbable pourtant où nous n’arriverions pas à vaincre la résistance qui s’esquissait. Budapest devait en 1896 célébrer en grande solennité le millénaire de l’État hongrois. Si les Jeux ne pouvaient se tenir en Grèce, ils se tiendraient en Hongrie. Une lettre de notre collègue hongrois, M. Kemény m’attendait à Athènes, suggérant en ce cas pour la présidence du Comité d’or-