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nous. Il semblait croire que cette situation pouvait se prolonger indéfiniment. Mais j’y voyais de nombreux inconvénients, surtout au moment où se menait au Racing-Club contre Saint-Clair la plus véhémente et la plus injuste des campagnes. Il s’était pendant quelque temps chargé de la trésorerie de cette société en plus du secrétariat général et les comptes, paraît-il, avaient été laissés dans un grand désordre. D’où les pires accusations lancées contre lui et des menaces d’enquête et de radiation. D’autre part, je ne voulais à aucun prix de la présidence à laquelle me poussaient un certain nombre de mes collègues. Je sentais mon action beaucoup plus puissante comme secrétaire général et je désirais la continuation du triumvirat formé par MM. Reichel, Marcadet et moi. M. Reichel était infatigable dans ses initiatives et son entrain ; il nous faisait en même temps de bonnes finances par son excellente comptabilité. Marcadet personnifiait le dévouement sous la forme la plus méritoire, celle qui se renouvelle à petites doses tous les jours de l’année. À chacune de nos réunions, c’était lui qui publiait les avis, recevait les engagements, les classait, veillait à tous les petits détails dont l’oubli eût enlevé à l’Union ces apparences d’ordre, d’exactitude et de minutie qui faisaient, aux yeux des scolaires, son mérite et une bonne part de son prestige. On ne dira jamais assez tout ce que l’Union doit à Marcadet.

Pour les motifs que je viens d’exposer, je m’étais décidé depuis quelque temps déjà à faire élire M. de Janzé. Cela ne fut pas très commode. Certains groupes trouvaient que l’Union s’aristocratisait par trop. M. de Janzé, par ailleurs, ne manifestait pas beaucoup d’enthousiasme. Il acquiesça par dévouement à une œuvre qui avait toutes ses sympathies. De caractère fier, un peu hautain, Léon de Janzé dominait absolument son milieu par ses grandes qualités de sang froid, de persévérance et de lucidité d’esprit. Partageant son existence active entre la Société de Sport de l’Île de Puteaux : qui était entièrement son œuvre et le canton de Neufchâtel qu’il représentait — et représente encore — au conseil général de la Seine-Inférieure, il n’était pas ambitieux et n’aimait guère les palabres. Du reste, de par la constitution établie en 1890, le Conseil où siégeaient aussi les représentants des membres honoraires était distinct du Comité composé des seuls délégués des sociétés affiliées. M. de Janzé n’étant pas délégué, ne pouvait présider le Comité. Cette tâche échut au nouveau président du Racing-Club, M. Michel Gondinet dont l’habileté, le tact et la prudence s’employèrent fort utilement dans cette tâche