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Page:Coubertin les responsabilités et la réforme de la presse 1924.djvu/7

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Mesdames, Messieurs,

Le sujet que j’aborde ce soir est d’une pénible actualité. Il s’agit d’un problème dont l’urgence n’égale que le soin avec lequel la discussion en est éludée. Si j’ose y toucher, c’est qu’il me semble être mieux qualifié qu’un autre pour en dégager les données. Depuis qu’il y a environ trente-six ans j’ai créé en France et dirigé la première revue sportive, revue fort intellectuelle d’ailleurs puisque Jules Simon et d’autres grands écrivains y collaboraient, je n’ai jamais perdu le contact avec la presse et suis demeuré le fidèle sociétaire d’une des principales Associations journalistiques de mon pays. Et pourtant l’entreprise à laquelle l’opinion s’est accoutumée à associer mon nom s’est élevée sans la presse, même malgré elle. Les motifs en furent complexes ; il serait oiseux de m’y référer en ce moment. Je reconnais, du reste, n’avoir guère recherché pour l’Olympisme renaissant une publicité dont je me méfiais plus que je n’en escomptais l’avantage. Quoiqu’il en soit, cela me place en un sentiment de grande indépendance vis-à-vis d’hommes auxquels je ne dois rien et dont, par ailleurs, je considère la mission — pour mal remplie qu’elle soit trop souvent de nos jours — comme l’une des plus hautes dont le progrès de la civilisation ait investi l’humanité.

En mes souvenirs d’adolescence, je retrouve l’image de plus d’un parmi les journalistes de droite et de gauche des premiers temps de la République et, évoquant la haute discipline morale qu’ils associaient aux qualités professionnelles, leur idéal, leur conscience, le respect profond qu’ils avaient de leur métier, l’effort intellectuel continu par lequel ils l’honoraient, je me permets de placer sous l’égide de leur mémoire la critique inspirée par les méthodes, les procédés, les habitudes d’esprit de leurs successeurs.

Des circonstances atténuantes, oh ! certes, il y en a. Parce qu’une institution a déchu, on n’est pas autorisé d’ailleurs à en rendre responsable en bloc la corporation qui en a la garde, Il faut avoir d’abord opéré le décompte des pesées extérieures dont cette corporation est peut être la victime.