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trouver le modèle précis : déjà du temps de Ménage on ne savait s’il fallait rattacher à Sidoine Apollinaire ou à Claudien la célèbre description du combat des Géants[1], dont l’Encelade rappelle aussi bien Horace. Il en est de même de beaucoup de lieux communs de la poésie amoureuse dont on trouve les antécédents chez Properce et d’autres.

Mais des conditions où l’on vit ici-bas,
Certes celle d’aimer est la plus malheureuse[2].


C’est exactement ce qu’avait dit Properce : mais il serait peut-être difficile de trouver un poète amoureux, latin, italien ou français, qui ne l’ait pas dit aussi.

Et sans atteindre au but où l’on ne peut atteindre
Ce m’est assez d’honneur que j’y voulois monter[3].


Cette idée, qui n’est naturellement chez Malherbe qu’un lieu commun littéraire — puisque c’est pour le duc de Montpensier qu’il « s’exalte » dans ces vers — il a pu la trouver dans Properce[4], il l’a rencontrée aussi dans

  1. Ode pour le roi allant châtier les Rochelois (Malh., I, 280). Cette description était fort admirée : « Jamais dit Balzac vantant une épigramme, jamais fable ne fut mise en œuvre avec tant d’art, non pas même celle des Géants dans le dernier poème du père Malherbe (lettre du 25 janv. 1645, Documents inédits (1873) I. p. 619.
  2. Malh., I, 305. Cf. Properce, II, XVI, 9 :

    Darius in terris nihil est quod vivat amante.

    Voir plus loin le chapitre VI : Les Italiens.

  3. Malh., I, 21.
  4. Prop., II, X, 5 :

    Quod si deficiant vires, audacia certe
    Laus erit : in magnis et voluisse sat est.