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FABLES ORIGINALES

Un proverbe nous dit : la joie est éphémère.
Celle des écrivains fut, hélas, passagère.
L’éditeur refusa leurs derniers feuilletons,
Prétextant que ce genre encombrait ses cartons.
Qui donc le pourvoyait ? la Perse ?… l’Angleterre ?…
Ne franchissez point la frontière.
Un malin découvrit
Les rivaux se livrant au trafic de l’esprit.
Nous écrivons rivaux, imprimons « des rivales
Du sexe le plus beau » Réclames et cabales
Sans cesse leur gagnaient maints lecteurs sérieux.
On était envahi par le flot des bas-bleus !!
La révolte éclata sous la tente d’Achille.
Les auteurs masculins doués d’humeur hostile
Déchirèrent, faut voir, le nouvel ennemi,
Raillant pattes-de-mouche et petit doigt noirci.
Est-ce dans l’encrier que la femme prépare
Le pot-au-feu bourgeois, l’anguille à la tartare ?
Ses malingres poupons négligés tous les jours
Ne doivent point avoir le nez propre toujours.
Enfin il n’est gros mots, injures, calomnies,
Pierres, cailloux, rochers, sanglantes avanies
Lancés de-ci de-là sur les pauvres Bas-Bleus.
Le bataillon lettré ne s’en porte que mieux.
La vogue suit ses pas, l’acclame, le caresse.
L’homme est à peine lu, le public le délaisse.
Regrettant son succès,
parlait d’entamer à tout prix un procès.
Mais la femme lui dit avec quelque malice :
« Vous perdriez encor par-devant la justice.