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L’ENSEIGNEMENT DE LA LANGUE CHINOISE

lit de Procuste, on la mutile et on la défigure. Comment, en vérité, parler d’un génitif, d’un accusatif quand le mot est invariable ? Comment parler d’un complément indirect et d’un complément direct, qui tantôt n’ont aucune marque spéciale, tantôt sont notés par une particule, souvent par un verbe, et qui usent en commun de plusieurs de ces modes d’expressions ? Comment distinguer l’adjectif et l’adverbe, le verbe et la préposition, le verbe et l’adjectif, le nom et la postposition, quand le même mot remplit tour à tour, côte à côte toutes ces fonctions ? Si nous voulons nous abstenir de ces divisions artificielles, de cette terminologie impropre, nous n’avons d’ailleurs qu’à nous conformer rigoureusement au précepte du P. de Prémare, que je rappelais tout à l’heure, et à suivre jusqu’au bout la voie ouverte par Stanislas Julien.

Ce grand sinologue, en effet, bien qu’il renvoie pour compléter sa Syntaxe nouvelle, aux grammaires déjà en usage, a réalisé un sensible progrès en modelant son exposé sur la langue chinoise même : il conserve la terminologie européenne, mais il n’essaie plus de faire rentrer le chinois dans le cadre du latin. Dans les Monographies (il se trouve déjà plusieurs monographies dans l’œuvre du P. de Prémare), il étudie un certain nombre de mots dans tous les rôles qu’ils sont aptes à remplir, méthode vraiment scientifique, parce que l’auteur y considère les faits en face et sans préjugé. Après un long intervalle, la Syntaxe nouvelle a suscité deux ouvrages qui participent à ses qualités : je veux parler du Wen-chien Tzu-chü Ju-mên, Notes on the Chinese Documentary Style[1] du Dr F. Hirth, et des Rudiments de parler et de style chinois (1er vol. , 1re moitié, pp.  32-248, Mécanisme du langage, 1895) par le P. Léon Wieger. Aux notes de M. Hirth, je ne reprocherai que trop de brièveté ; à la grammaire du P. Wieger, grammaire toute consacrée à la langue parlée, je ferai une objection un peu plus grave ; c’est tout en analysant avec autant de précision que de finesse l’essence même du mot chinois dans ses emplois variés, d’avoir conservé le plan des grammaires européennes ; les rapprochements avec les modes d’expression du français ont sans doute leur intérêt, mais je crois qu’à les présenter comme accessoires, l’auteur eût donné plus de clarté à son livre. À côté de ces deux ouvrages et inspirée comme eux de la Syntaxe nouvelle, j’ai aussi à mentionner la méthode d’enseignement inaugurée en 1889, à l’École des Langues orientales, par mon maître, M. Devéria, qui malheureusement n’a pas encore publié son cours. Ainsi l’étude de la langue et l’enseignement avec elle, sont entrés dans une nouvelle voie, abandonnant les formes de la gram-

  1. 1888 (Bibl. sin., 1844).