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En suivant la progression indiquée dans le chapitre précédent, on est amené à considérer les phénomènes les plus simples que nous offre la nature vivante, et qui pourtant dépassent déjà de beaucoup, par le degré de complication, les phénomènes les plus complexes de la physique corpusculaire. Pour l’explication des phénomènes de la nature vivante, il faut tenir compte des propriétés fondamentales de la matière ; il faut savoir appliquer la mécanique des solides et celle des fluides ; il faut surtout faire intervenir les actions chimiques ; et le choix même que la nature a fait d’un petit nombre d’éléments chimiques, jouissant de propriétés singulières, pour fournir presque exclusivement les matériaux du règne organique, indique assez qu’il faut puiser dans la chimie les conditions les plus immédiates du développement des forces organiques ; mais d’un autre côté, si le chimiste regarde comme chimérique l’entreprise de ramener à un problème de mécanique ordinaire l’explication des phénomènes qu’il étudie et des lois qu’il constate, le physiologiste regarde comme encore bien plus chimérique la prétention d’expliquer, par le seul concours des lois de la mécanique et de la chimie, un des phénomènes les plus simples de la vie organique, la formation d’une cellule, la production d’un globule du sang, ou, parmi les fonctions plus complexes et qui néanmoins dépendent le plus immédiatement du jeu des actions chimiques, la digestion des aliments, l’assimilation des fluides nourriciers. Encore moins surmonterait-on la répugnance de la raison à admettre