Page:Courouble - L'étoile de Prosper Claes, 1930.djvu/31

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Mais l’enfant, bien doué, trouvait tant de charme à s’instruire qu’il en sut bientôt aussi long que ses modestes professeurs. Plus tard, quand il eut appris la comptabilité, les bons quincailliers l’installèrent à Molenbeek, chez des artisans de leur connaissance et le prirent comme secrétaire pour tenir les livres et faire la correspondance ; l’infirme avait alors seize ans à peine, quoiqu’il en parût davantage à cause de cet air de gravité, de résignation triste qui empreignait son visage.

Prosper, qui ne l’avait que rarement rencontré au cours de son enfance, s’était pris tout de suite pour l’adolescent d’un vif intérêt, lequel ne fit que grandir lorsque les circonstances l’eurent déterminé à prendre la direction des affaires Bernard était un aide intelligent qui savait le comprendre et auquel il témoignait la plus affectueuse bienveillance. Aussi est-ce avec un profond chagrin que le commis avait vu partir son jeune patron pour la guerre, sans compter qu’il éprouvait un sentiment de honte de n’avoir pu l’accompagner. Patriote ardent, comme il l’aurait suivi avec joie ! Et c’était une souffrance de plus chez le pauvre garçon que de devoir étouffer ses élans civiques, car il sentait tout le ridicule, l’inconvenance des déclamations chauvines chez un invalide, incapable de rendre aucun service à la guerre.

De nouveau, le jeune homme avait interrompu sa tâche monotone et, accoudé sur le pupitre, songeait au malheur de ne pouvoir servir quand son attention fut attirée par un soldat qui venait