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Mme KAEKEBROECK À PARIS

monde. Il la humait avec délices en léchant des yeux toutes ces friandises poisseuses et multiples, versées comme d’une corne d’abondance dans les bacs de zinc du comptoir.

Par exemple, les échoppes de gargotiers le dégoûtaient absolument. Et pourtant, un attrait singulier le retenait en face de ces vitres embuées de vapeur grasse, derrière lesquelles s’alignaient des platées hétéroclites, savourets innommables, toute une nourriture ancienne, faisandée, suspecte. C’était des morceaux de raie enlisés dans la daube d’énormes saladiers sales, des plies frites de huit jours étalées sur des gazettes crasseuses, des tronçons d’anguilles nageant dans un jus vert, putride ; des poires cuites dressant leurs queues mélancoliques hors d’une ignoble lavasse, sirop ou purin, on ne savait trop lequel.

Et sur tout cela, tombant en guirlandes, des rubans de glu, noirs de cadavres de mouches.