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MADAME DESBORDES-VALMORE À BORDEAUX

Et Marceline lui répondit par des vers, « et des larmes aussi qui voulaient passer entre les grilles » :

Quoi ! c’est d’une prison que sort cette lumière !
Incline-toi, mon âme, au pied de ce flambeau.
C’est la religion qui soulève un tombeau.
C’est l’attente qui veille au fond de sa prière.
Nuls verrous entre l’homme et Dieu[1]

En octobre 1834, elle lui adresse de nouveaux vers, considérant « comme un devoir la dette au prisonnier ». Et elle écrit à Gergerès :

Vous savez comme il a grandi dans mon âme, depuis son exil de ce monde. Je le plains, je l’aime, je l’honore et, puisque vous croyez qu’une créature si humble et si malheureuse que moi puisse verser une ombre de discrétion consolante dans une si longue infortune, j’ai osé lui écrire[2].

Ces vers, c’était l’Élégie à M. de Peyronnet, où elle faisait allusion à l’encrier historique :

Et dans ce don sacré du Tasse
Il reste de l’encre et des pleurs.

Elle en avait adressé l’ébauche à Gergerès. Le 17 février 1835, elle lui écrivait :

Ne laissez pas paraître dans la Gironde les vers incomplets pour M. de Peyronnet ; je les ai envoyés tout corrigés à la Revue du Nord, à Lille, où j’ai lu plusieurs fois des articles si remarquables de cet homme infortuné. Si vous le voulez, je vous les enverrai moins indignes du sentiment qui me les a fait écrire[3].

Un an plus tard, elle s’inquiète du prisonnier de Ham :

Vous ne dites rien de M. de Peyronnet. Je suis consternée de le savoir malade et enfermé. Gergerès, quel courage dans cette âme ! Mes prières tombent par terre, je le vois bien ; car il est encore là, et rien ne change. Le malheur est en plomb, Mme Géraud le sait bien[4].

  1. Pauvres fleurs, 1839, p. 131.
  2. Lettres inédites, p. 53-54 (18 octobre 1834).
  3. Pougin, p. 208.
  4. Lettres inédites, p. 57-58 (16 octobre 1835).