Page:Courteline - Le Train de 8 h 47, 1890.djvu/129

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Ils accueillirent d’une acclamation enthousiaste l’entrée en gare du train de 8 h. 47, dont ils prirent d’assaut un compartiment vide.

Ils s’installèrent en vis-à-vis, chacun se carrant en son coin, gagné à une importance de propriétaire qui va se faire des joues aux champs. De la poche tendue de Croquebol, le goulot d’un litre sortait. Un moment, ils se regardèrent en silence, mirant l’un dans l’autre leur allégresse mutuelle ; mais tout d’un coup elle déborda. La Guillaumette n’eut qu’à compter « Une ! deusse ! troisse ! » pour qu’aussitôt ils se comprissent et partissent à l’unisson, beuglant éperdûment la reine d’Angleterre, ce déversoir obligé des larges gaietés soldatesques :

C’est la rein’d’Angleterre,
Ter, ter, ter, ter,
Q’a perdu son puc’lage
Avec Abd-El-Kader.
Der, der, der, der,
Sur un’ toil’ d’emballage !
Sur un’ toil’ d’emballage !