Page:Courteline - Le Train de 8 h 47, 1890.djvu/78

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nerveuses des juments. Elles le laissaient faire, complaisantes, tournaient sur lui leur gros œil doux, appuyaient à droite ou à gauche crainte de le heurter de leurs sabots, tandis qu’il traînait, dans le fumier des litières, son petit derrière de crapaud éternellement barbouillé.

À huit ans, il savait son régiment par cœur, les noms des officiers, les matricules des hommes, et commençait de siroter le fond des verres demeurés sur le comptoir après le départ des buveurs.

Enfant de troupe, soldat, officier, il se para, à son corps défendant, de galons noblement gagnés ; au fond, vieux gamin de caserne, il regrettait la chambrée, l’odeur violente de ses cuirs, le bel arrangement de ses paquetages et ses batailles à coups de traversin.

Du reste, il frayait peu avec ses collègues, qu’il honorait d’une considération relative mêlée d’une pointe de méfiance ; il mangeait au mess par obligation, mais, la dernière bouchée dans le bec, il fi-