Page:Courteline - Les Linottes, 1899.djvu/64

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ma fille, elle est jolie ;
Voici sa dot, elle est en or.

— « Je n’en veux pas ! répondra l’éditeur, opiniâtrement insurgé contre sa propre raison d’être.

— « Prenez mon ours, sacrebleu !

— « Non !

— « Je vous l’abandonne à vil prix !

— « Non !

— « Prenez-le pour rien, alors !

— « Je n’en veux pas ; je vous dis ! Non et non ! »

Eh bien, il y a là un vice qu’il est urgent de réformer. J’ai donc imaginé ceci : je vais trouver sous ses lambris l’homme de talent, dont je vous parle, je lui achète honnêtement cinq cents francs, à mes risques et périls, l’œuvre qu’il eût cédée pour rien, et devenu l’intermédiaire entre l’auteur – qui me bénit ! – et l’éditeur, que je persuade à l’aide de mon éloquence – là est la difficulté mais en même temps la raison d’être et le côté large du projet ! – je deviens, moyennant vingt-cinq louis, seul propriétaire d’un ouvrage qui peut très bien me rapporter cent ou cent cinquante mille francs, par la raison que je dois, un jour, forcément, logiquement, inévitablement, mettre la main sur la poule aux œufs d’or ! Cela ne crève pas les yeux d’évidence ?

Il posa la question, et, d’un geste élargi qui prenait le globe à témoin, il y répondit sur-le-champ. Son rire sonore saluait des victoires certaines.

— Vous verrez, mon cher ! vous verrez !

Là-dessus, à propos de rien, sans même se donner la peine de chercher une transition, il conta qu’il avait trouvé un truc